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Le présent ouvrage s’inscrit dans une série de livres blancs et de guides pratiques du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz. Il revient, en 99 articles et entretiens, sur les principales évolutions du droit social et leur impact sur la profession d’avocat, tant sur le plan de l’exercice professionnel que de la gestion et de la stratégie de développement des structures d’exercice, autour d’écrits, de podcasts et de vidéos.
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Réunissant près de 140 contributeurs, professeurs, avocats, magistrats, conseillers prud’hommes, inspecteurs du travail, responsables des ressources humaines, juristes, experts, etc., cet ouvrage ne prétend à aucune exhaustivité. S’il offre des clés de compréhension, il a d’abord été conçu comme une mosaïque de libres expressions et de contributions librement choisies par leurs auteurs servant de jalons à un débat plus large et approfondi. C’est ce débat, ce dialogue indispensable à une pleine adaptation aux changements présents et à venir, que le Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz entend accompagner, notamment avec l’organisation dans les prochaines semaines d’évènements-débats à Paris et en région.
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Krys Pagani - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Krys Pagani

Pilote du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Laurent Dargent - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Laurent Dargent

Rédacteur en chef, Dalloz actualité
Co-pilote du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

De l'art de la transition

Publié le 29/11/2022

Christophe Radé - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Christophe Radé

Professeur à l’Université de Bordeaux 
De l'art de la transition - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

 

La loi est devenue tellement instable ces dernières années qu'a émergé une nouvelle catégorie de régime, celui d'un droit de la transition. Les juristes doivent donc rechercher dans les lois nouvelles les dispositions qui organisent les périodes transitoires, et ces régimes se sont sophistiqués au fil du temps, et être capables d'anticiper les réactions de la jurisprudence. D'une manière générale, le juge adopte face au changement une prudente attitude conservatrice et ne modifiera ses habitudes que s'il y est contraint par un changement d'esprit de la législation nouvelle. 

 

Les spécialistes du droit du travail qui ont professionnellement vécu ces vingt dernières années savent à quel point le rythme des réformes s’est frénétiquement accéléré, provoquant un effet fort justement qualifié de stroboscopique par notre collègue Emmanuel Dockès [1] et des angoisses à répétition devant l’énormité, et la complexité, de la tâche à accomplir. Dans cet univers en perpétuelle expansion qu’est devenu le droit du travail (et plus largement le droit social si on englobe, ce qui est indispensable dans une approche pratique du droit, la protection sociale légale et conventionnelle), plus que jamais les juristes spécialisés doivent redoubler d’efforts, et de vigilance, dans leur gestion de l’instabilité normative. Se dessine alors la silhouette d’un avocat, spécialiste du changement, d’un juriste développant des compétences propres faisant de lui un expert non seulement de son droit, mais des mutations qui l'affectent périodiquement. 

 

De l’art d’accompagner le changement

 

La publication d’une loi nouvelle modifie nécessairement l’état du droit et pose des problèmes classiques de droit transitoire, qui font les délices des étudiants de première année. Les principes qui gouvernent l’entrée en vigueur de la loi nouvelle sont connus : la loi entre en vigueur le lendemain de sa publication au Journal officiel ; elle s’applique aux faits et situations qui naissent à compter de ce jour ; elle ne peut en principe pas remettre en cause les droits acquis sous l’empire de la loi ancienne ; elle peut s’appliquer immédiatement aux faits et situations antérieures qui n’ont pas produit tous leurs effets ; les contrats demeurent soumis à la loi en vigueur à la date de leur conclusion, sauf en droit du travail où l’ordre public est par principe « social » et où la loi nouvelle, qui est censée s’inscrire dans une dynamique de progrès, s’applique immédiatement aux contrats et conventions formés antérieurement. 

 

Ces dispositions, qui constituent certaines des règles applicables à ce qu’on peut appeler le « droit commun transitoire », sont complétées par des règles particulières qui sont autant de régimes particuliers, mais également par des dispositifs ponctuels insérés dans les lois nouvelles elles-mêmes et qui viennent compliquer encore la tâche du juriste.

 

Au titre des régimes transitoires permanents spéciaux, les règles introduites en 2008 dans le code civil pour accompagner la transition en matière de droit de la prescription doivent être saluées car elles ont été largement mobilisées ces dernières années à l’occasion des réformes successives des règles de prescription en droit du travail : outre la réforme du droit de la prescription intervenue en 2008 (Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008), qui a ramené la prescription de droit commun de 30 à 5 ans (C. civ., art. 2224), le législateur a consacré une disposition spéciale aux actions en discrimination dotées d’un délai de 5 ans, d’un point de départ spécifique (« la révélation ») et d’une nature exclusivement procédurale (5 ans pour saisir le juge) puisque l’entier préjudice résultant de la discrimination sur l’ensemble de la période litigieuse demeure réparable (C. trav., art. L. 1134-5). Il a ensuite introduit deux nouveaux délais plus courts en 2013 (Loi n° 2013-504 du 14 juin 2013) de 2 ans pour les actions relatives à l’exécution et la rupture du contrat de travail (C. trav., art. L. 1471-1) et de 3 ans en matière de rémunération (C. trav., art. L. 3245-1), et encore raccourci le délai pour agir après la rupture du contrat de travail à 12 mois en 2017 (Ord. n° 2017-1387 du 22 sept. 2017). 

 

Pour régler les conflits de règles de prescription dans le temps, le Code civil a fixé des règles, notamment celle concernant le raccourcissement des délais et qui oblige à un double décompte dans le cadre de l’ancien délai, s’il n’est pas arrivé à terme au moment de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, et du nouveau qui commence à courir à compter de l’entrée en vigueur de cette loi nouvelle (C. civ., art. 2222) ; c’est alors l’écoulement du premier de ces deux délais qui...

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