Le doctorat constitue-t-il une plus-value dans l’exercice de la profession d’avocat en droit social ?

Quel regard vos interlocuteurs portent-ils sur l'avocat titulaire d'une thèse ? Avez-vous le sentiment que la thèse est valorisée en interne au sein des structures ? Est-ce valorisé par les clients ?

Le travail de recherche permet d’acquérir une connaissance approfondie et, ce faisant, une véritable expertise. C’est cette expertise qui permet de s’exprimer par la suite avec une légitimité pleine et entière.

Dans les entreprises comme dans les médias, le docteur est de plus en plus souvent perçu comme un garant d’expertise. Son intervention sur des dossiers complexes est susceptible de rassurer les clients, surtout s’ils sont étrangers. 

Appréciable en tant qu’expertise externe, la posture du chercheur en droit peut aussi s’avérer bénéfique en termes d’image. Le prestige du diplôme, la notoriété acquise par des publications et des conférences, une collaboration universitaire sont autant d’éléments susceptibles de participer à la satisfaction des clients. 

Le travail de recherche développe également une pensée critique qui est fortement valorisée par les universités et centres de recherche mais aussi par des organisations publiques et privées qui cherchent des spécialistes pour la direction de leurs projets. 

L’expertise acquise se traduit également par la capacité avérée à rédiger des documents qui nécessitent un raisonnement juridique complexe, tout comme par le développement de capacités analytiques particulièrement précieuses dans le monde du travail. 

Le doctorat est-il valorisé à l'embauche, notamment en termes de rémunération ?

À court terme, le doctorat en droit est d’abord une gratification personnelle car on ne peut pas dire qu’il ouvre en grand les portes de tous les cabinets d’avocats ou des directions juridiques. En effet, majoritairement des jeunes docteurs ne bénéficient pas de conditions d’embauche plus favorables que les détenteurs d’un master. 

Il faut aussi dire qu’il existe encore une certaine « défiance » vis-à-vis des docteurs qu’on projette d’abord sur des carrières universitaires. Lors des entretiens d’embauche, les docteurs doivent ainsi justifier une orientation qui n’apparaît pas toujours « naturelle » pour leurs interlocuteurs. 

En revanche, une fois en poste il y a souvent un phénomène de « rattrapage » et les détenteurs d’un doctorat peuvent remonter plus vite dans la hiérarchie. En effet, la rédaction de la thèse est un parcours d’excellence où l’apprentissage sur soi se combine avec la fierté d’être allé au bout d’un défi. Les docteurs connaissent le goût de l’effort intellectuel et s’intègrent ainsi plus facilement à leur environnement de travail.   

Enfin, à plus long terme on constate une situation globalement très bonne pour les détenteurs d’un doctorat en droit. Finalement, si en France le doctorat n’a pas (encore) le même prestige que dans les pays anglo-saxons ou qu’en Allemagne, il appartient aux docteurs de savoir mettre en avant les atouts de leurs parcours pour convaincre leurs interlocuteurs de ce qu’ils peuvent leur apporter. 

Dans quelle mesure le fait d'avoir préparé et soutenu une thèse aide aujourd'hui dans la pratique du métier d'avocat ?

Sur le marché de l’expertise juridique, la tendance actuelle à la spécialisation mais aussi à la complexité croissante des sujets, constitue un environnement favorable pour les avocats détenteurs d’un doctorat. 

La thèse est un travail de longue haleine qui requiert de la passion et un grand investissement. Si les docteurs sont capables d'innover dans le domaine du savoir, ils disposent aussi d'un savoir-faire et un savoir-être particuliers grâce à leurs activités doctorales et extra-doctorales, ainsi qu'à la gestion de projet. 

En assumant la responsabilité de recherches dont ils doivent constamment maîtriser chaque aspect, les doctorants appelés à devenir docteurs s'approprient également très tôt les ressorts essentiels de la logique entrepreneuriale bien loin du confort routinier formé pour s'attaquer à des problèmes dont nul ne connaît la solution. 

Il s’agit d’une expertise très précieuse dans un environnement qui est de plus en plus complexe à comprendre et à maîtriser. Évidemment, travailler sur un sujet très pointu n’implique pas que les connaissances acquises se limitent à ce sujet.

Une recherche sérieuse oblige enfin à en maîtriser les aspects périphériques, d’autant que des approches transversales sont très souvent nécessaires. Les capacités d’analyse et de synthèse développées au cours de la thèse constituent des atouts supplémentaires pour affronter les situations...