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Le présent ouvrage s’inscrit dans une série de livres blancs et de guides pratiques du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz. Il revient, en 99 articles et entretiens, sur les principales évolutions du droit social et leur impact sur la profession d’avocat, tant sur le plan de l’exercice professionnel que de la gestion et de la stratégie de développement des structures d’exercice, autour d’écrits, de podcasts et de vidéos.
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Réunissant près de 140 contributeurs, professeurs, avocats, magistrats, conseillers prud’hommes, inspecteurs du travail, responsables des ressources humaines, juristes, experts, etc., cet ouvrage ne prétend à aucune exhaustivité. S’il offre des clés de compréhension, il a d’abord été conçu comme une mosaïque de libres expressions et de contributions librement choisies par leurs auteurs servant de jalons à un débat plus large et approfondi. C’est ce débat, ce dialogue indispensable à une pleine adaptation aux changements présents et à venir, que le Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz entend accompagner, notamment avec l’organisation dans les prochaines semaines d’évènements-débats à Paris et en région.
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Krys Pagani - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Krys Pagani

Pilote du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Laurent Dargent - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Laurent Dargent

Rédacteur en chef, Dalloz actualité
Co-pilote du Comité stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Les avocats des instances représentatives du personnel et des organisations syndicales face à la déjudiciarisation des rapports de travail

Publié le 29/11/2022

Emmanuel Gayat - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

Emmanuel Gayat

Avocat associé, JDS Avocats
Les avocats des instances représentatives du personnel et des organisations syndicales face à la déjudiciarisation des rapports de travail - Comité Stratégique Avocats Lefebvre Dalloz

 

Le droit social a connu ces dernières années des réformes profondes qui témoignent d'une volonté de restreindre les droits d'action en justice des salariés et de leurs représentants. Cette déjudiciarisation des rapports de travail impose une transformation profonde de l'activité de l'avocat des instances représentatives du personnel et des organisations syndicales. 

 

Le droit social est marqué, depuis l’enchaînement des lois du 14 juin 2013 relative « à la sécurisation de l’emploi », du 17 août 2015 relative « au dialogue social » et du 8 août 2016 relative « au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels » et des ordonnances du 27 septembre 2017, en particulier celle relative à « la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail » par une déjudiciarisation très importante des rapports de travail.

 

L’ensemble de ces lois, comme leurs intitulés technocratiques l’indiquent clairement, avait pour objet le renforcement de la sécurité juridique des employeurs. Elles permettent désormais aux employeurs de disposer d’une prévisibilité des conséquences de la violation calculée des règles de droit. Elles ont eu pour effet de réduire l’effectivité des droits des salariés, en prenant soin de ne pas frontalement et explicitement supprimer des garanties aux salariés (comme l’avaient tenté maladroitement les gouvernements précédents avec des dispositifs tels que le « contrat nouvelle embauche »), mais en privant cyniquement ces salariés de l’accès efficace au juge pour faire respecter ces garanties.

 

Nous écrivions déjà, il y a 17 ans, que :

 

« En droit du travail les phénomènes d'insécurité juridique tiennent plus, d'une part, au recul des possibilités de contrôle judiciaire des actes de l'employeur et, d'autre part, à la latitude laissée au pouvoir de direction de l'employeur qui tend à s'élargir. La dénonciation de l'absence de légitimité du contrôle du juge de la conformité des actes unilatéraux et conventionnels en droit du travail commence à avoir des traductions juridiques concrètes qui sont sources d'insécurité (…) Décidément, l'intervention active du juge dans le contrôle des agissements des employeurs, gage d'application de la loi et donc de sécurité juridique, recule » (Un débat sur la nature et le rôle de la jurisprudence ou une promotion de la sécurité juridique des employeurs ? avec A. de Senga, Dr. ouvrier 2005. 146).

 

La tendance qui s’amorçait timidement alors, n’était pourtant d’aucune commune mesure avec l’avalanche inaugurée par la loi de 2013.

 

Ce mouvement s’est traduit d’abord par une restriction très importante du droit d’action en justice des salariés et des instances de représentation du personnel du fait, notamment :

- du transfert du contrôle des plans de suppressions d’emplois vers l’administration, interdisant tous recours détachés de l’action en contestation de la décision administrative de validation ou d’homologation ;

- du caractère réduit du contrôle du juge administratif sur ces plans de suppressions d’emplois ;

- de l’instauration de délais de forclusion très courts pour les actions en justice des salariés (2 ans pour les litiges relatifs à l’exécution du contrat, 1 an pour les contestations de ruptures de contrat), des organisations syndicales (2 mois pour les actions en contestation des accords collectifs de travail et des décisions d’homologation des PSE), et des comités sociaux et économiques (action portant sur une procédure d’information et de consultation devant être engagée avant le délai préfix de remise d’avis) ;

- de la réduction des délais de prescription des salaires de 5 à 3 ans ;

- de l’instauration de plafonds d’indemnisation en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

Ces lois se sont de surcroît inscrites dans un cadre plus général tendant à restreindre l’accès au juge en toutes matières. Les réformes récentes des règles de procédure, qui ne sont motivées que par le dénuement des juridictions et la volonté de réduire l’accès à ce service public, tendent également à réduire cet accès :

- restriction des délais de prescription de droit commun de 30 à 5 ans ;

- promotion en toute matière des solutions alternatives de résolution des litiges (conciliation préalable obligatoire ou médiation autoritairement imposée…) ;

- extension de la représentation obligatoire (devant le tribunal judiciaire en référé, devant la Cour d’appel en matière prud’homale…) ;

- complexification à l’extrême de la procédure civile (procédure d’appel destinée explicitement à provoquer le plus grand nombre possible de caducités, transfert de la compétence au juge de la mise en état du...

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